Principe

Fléau principal à bras égaux, relié à un levier annexe situé en dessous et appelé "contre-fléau" (qui peut être en deux parties), l'ensemble formant un parallélogramme. Chaque bassin est supporté par une tige verticale reposant via une traverse sur les couteaux de l'extrémité du fléau et reliée à une extrémité du contre-fléau.

Apparition

En dépit d'une légende tenace et encore trop répandue, il n'a été découvert à ce jour aucune preuve matérielle ou documentaire qui puisse étayer l'hypothèse de l'invention par Gilles Personne de Roberval (1602-1675) de la balance Roberval telle que nous la connaissons. Cet éminent mathématicien a seulement présenté en 1669 à ses collègues de l'Académie Royale des Sciences un appareil scientifique expérimental, construit par ses soins, afin de mettre en évidence une "énigme statique", découverte dont l'application a effectivement permis bien plus tard la construction d'un instrument de pesage avec des bassins placés au-dessus du fléau. La paternité de cette idée brillante n'est pas connue avec certitude mais elle semble devoir être attribuée au mécanicien londonien John Medhurst dont des réalisations sont citées dès 1818 et qui en proposait déjà une demi-douzaine de modèles sur catalogue en 1828. En France, la première trace officielle connue à ce jour d'une "balance anglaise", comme on les appelait à l'époque, est constituée par le catalogue l'Exposition des produits de l'Industrie française de 1819 au Louvre, manifestation où le balancier Chemin fut récompensé pour deux balances produites en 1818 (ou peut-être même quelque mois auparavant).

Admissions répertoriées en France

La première admission fut obtenue par le fabricant lyonnais Joseph Béranger le 5 décembre 1840, suivie de près par une autre prononcée au profit de la société des Constructions mécaniques de Strasbourg le 6 janvier 1842. Ce fut une période de tâtonnements techniques en ce qui concerne la réalisation de la liaison entre le contre-fléau et le bas des tiges, la solution définitive n'apparaissant que sur le modèle qui a fait l'objet de la troisième admission prononcée le 22 février 1853 au profit du constructeur parisien Wimmerlin. En un peu moins d'un siècle (entre1840 et 1930), 18 admissions concerneront des modèles de balances Roberval mais cet instrument, très critiqué par les vérificateurs pour son manque de précision et de justesse, ne réussira vraiment à s'imposer qu'à la fin du XIXe siècle.

Echelle de portée, principaux types, matériaux utilisés

En France, les portées présentes aux catalogues des constructeurs s'échelonnaient en général entre 500 g et 50 kg mais on en connaît de portée 100 g et même moins (exemplaires de démonstration ?).

La plupart des modèles ont un fléau simple, ceux à deux bras parallèles apparaissant surtout dans les fabrications Béranger antérieures à 1845. Les modèles à contre-fléau apparent sont rares. Les deux types de socle les plus fréquents sont soit en fonte, en forme de parallélépipède étroit aux d'extrémités flanquées de cylindres balustrés ou de tronc de pyramide à base rectangulaire, soit, pour les modèles de luxe, à boîte en bois avec le dessus en marbre. L'index d'équilibre est le plus souvent du type "aiguille" adossée à un limbe en laiton servant également de décoration avec parfois une forme originale qui constitue la "signature" de certains constructeurs. Le type à flèches horizontales opposées est ancien et rare, l'aiguille pointe en bas (moins fragile et moins dangereuse pour l'opérateur se rencontre surtout dans les modèles les plus récents au XXe siècle.

Outre-Manche, le fléau à deux bras parallèles est le plus répandu. Les modèles courants ont un socle en fonte, court et aux formes arrondies. Côté poids, le plateau (inamovible) est en fonte et de forme rectangulaire, alors que côté marchandises le bassin, amovible, est en laiton ou en tôle, formé en coupe plus ou moins concave. Les modèles de luxe à boîte en bois et dessus marbre sont souvent assez proches des productions françaises. En général, ni les uns ni les autres ne possèdent d'index, la plupart n'étant pas oscillants (vibrating) mais astables (accelerating). Les modèles à contre-fléau supérieur dits "Inverted Imperial Scales" (sans équivalents en France), apparus dans les premières décennies du XIXe siècle, étaient utilisés pour des portées moyennes dans les commerces alimentaires sédentaires, en particulier dans les boucheries.

Aire géographique de diffusion

La balance Roberval est fréquente en France et en Angleterre, plus rare dans certains pays d'Europe occidentale qui lui préfèrent le système Béranger ou Phanzeder (Allemagne) et interdite dans d'autres (Suisse).

Domaines d'utilisation

Concurrencées et surclassées par les balances-pendules Béranger (plus stables mais plus encombrantes) dans les commerces sédentaires, en particulier pour les modèles de luxe, les Roberval furent longtemps très populaires sur les marchés et comme balances de ménage. Elles ont également fait partie de l'équipement standard des administrations (Poste), des banques et de divers commerces de détail, alimentaires ou non.

Trois modèles français antérieurs à 1880

Base en noyer, mécanisme en laiton (à l'exception du contre-fléau, des traverses et des couteaux qui sont en acier). Plateaux munis d'un système de verrouillage sur les berceaux ; aiguille d'équilibre richement décorée tout comme le repère (angelot) en regard. Marque "BERANGER & CIE LYON" et date "1844" gravées sur la plaque au-dessus de la traverse centrale. Bassins insculpés du poinçon primitif "couronne royale" ainsi que des lettres annuelles E (1846) et F (1847). Dim. : coffret 69 x 18 cm ; long. fléau 50 cm, larg. 14 cm ; haut. tle 20,7 cm. Bassins : l’un de diamètre 30 cm , l’autre rectangulaire 28,5 x 35 cm (portée non indiquée, probablement de 25 ou 30 kg).

Sophistiquée dans sa présentation, extrêmement soignée dans sa fabrication et originale dans ses caractéristiques techniques, cette rare et luxueuse balance représente probablement l'avant-dernier modèle de Roberval produit par Joseph Béranger avant de concevoir sa "balance- pendule" en 1845.

Balance Roberval de grand luxe, signée Béranger & Cie
Grande balance Roberval, de marque Frey & Studer

Base en fonte moulée, portant au centre une plaque en laiton gravée de la marque "FREY ET STUDER STRASBOURG" et insculpée de la portée "K° 20 " ainsi que du n° de série " N° 1944". Fléau insculpé du monogramme "F & S" dans un cercle, du poinçon "à la bonne foi" et du n° de bureau " 281" (Sélestat). Bassins épais (1,5 mm), en maillechort, sans marque ni poinçons.

Dim. : socle 60 x 13 cm ; hauteur totale 31 cm ; diamètre bassins 30,5 cm.

Une des premières Roberval, déjà très proche des productions du XXe siècle mais avec une forme de socle typique de la production de Strasbourg à l'époque et des extrémités de fléau ouvertes en "V" portant deux couteaux séparés (caractéristiques des modèles les plus anciens).

Boîte monoxyle (évidée pour le mécanisme), tablette en marbre, tiges et support central en bronze. Limbe de l'index d'équilibre formé de deux dauphins entrelacés. Marque "A. LEPRESTRE 33 35 RUE DU BAC ROUEN" sur les bassins (mais sont-ils appariés d'origine ?) et emblème d'un fabricant différent, non répertorié, (PF couronné) sur le fléau, également insculpé du poinçon de vérification première "à la bonne foi". Bassins insculpés du poinçon "à la bonne foi", et de 4 lettres annuelles.

Dim. : coffret 42,5 x 11 x 7 cm ; hauteur totale 24,5 cm ; long. fléau 28 cm ; diamètre bassins 20 cm.

Roberval luxe, signée Leprestre